mirlitons

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage prennent à l’apéro, des cornichons de mers. Ceux-là qu’on dit aussi cornichons de voyage. Légèrement sucrés, subtilement amers. Pour les qualifier, les épithètes pleuvent. Ils feraient phosphorer le plus sot bourrichon. Ils tiennent bien au corps et l’on dit qu’ils émeuvent le plus inébranlable à la vue d’un nichon.
En allant à Ouessant — la belle occidentale — le robuste Fromveur fait une brève escale dans une petite île aux charmes plus secrets. Molène. Offerte aux vents et aux soleils d’Iroise Vite, les matelots y débarquent le fret, sous les yeux des iliens accourus sur la cale. Dans le semblant de port, se moquant des rafales, les bateaux des pêcheurs sont fermement ancrés. Molène, offerte aux vents et aux soleils d’Iroise, un jour essuie les grains sous des nuées ardoise, un autre...
Le soleil point’ le bout d’son nez dans la grisaille et dans l’ouest apparaît un lambeau de ciel bleu. Pour sûr, ça va s’lever, il suffit que j'y aille. Ça s’pass’toujours comm’ ça par les matins brumeux. Mais ça ne se lèv’ pas. Les paupières humides, je tente obstinément de percer le brouillard. Phébus ayant planqué sa binette livide, je me guide aux appels de goélands braillards. Pas un souffle de vent, pas une vaguelette. Seulement sur tribord cette plainte...
« C’est mon plus bel esquif, avait dit la vendeuse, il est sûr, il est vif, rapide et manoeuvrant. » Je n’ai pu résister à sa verve enjôleuse et je me suis offert ce joyau de l'estran. Sans tarder, sous les pins d’une plage discrète, je glisse mon esquif dans quelques pouces d’eau. Sobrement ceinturé d’une affreuse jupette, j’essaie de m’insérer dans un étroit goulot. Je m’y prends à trois fois pour loger mes guiboles et découvre bientôt, nonobstant la pétole, que...
Volatile démocratique et routinier, le cormoran prend-il donc cet air héraldique pour épater le tout-estran ? Ailes en croix comme un prophète, ce brave palmipède pète -t-il plus haut que son croupion ? Veut-il épater l’hirondelle de mer ou le goéland ? Meuh non. Loin de chercher querelle, lorsqu’il développe ses ailes, il les sèche, tout simplement.
Sur une île bretonne au rivage enchanteur, un jeune kayakiste, un tantinet poète, recueillit un beau jour, en pêchant la crevette, un bébé cormoran promis au prédateur. Chez « Mimi la palourde », où tout un peuple écluse, chacun le reconnaît, ce type est un cador. Il avait appelé son esquif « Syracuse », de même il appela son oiseau « Salvador ». Devenu moussaillon, le jeune palmipède s’affirma plus futé qu’un certain Archimède : dès lors qu’il s’immergeait, il...
Entends ma supplique, ô Neptune, Dieu des kayaks et des voiliers, désolé si je t’importune, il y a de quoi rouscailler. Sur nos flots, hier si tranquilles, se sont pointés trois abrutis, mi-canassons, mi-projectiles, les baigneurs sont anéantis. Tu le sais, je suis pacifique, mais ces frimeurs motonautiques me tapent sur le carafon. Neptune, avant que je déconne, sous un pic de testostérone, envoie ces jet-skis par le fond !
(Œuvrette de Razkayou sur les rimes d’un sonnet de Rimbaud) Plutôt que me farcir l’eau vive des rivières au risque de trouver ma carène en haillons, éventrée par les rocs de la montagne fière, je kayakise en mer et j’en sais un rayon. Mon vaillant pagayeur navigue tête nue et même bras idem lorsque le ciel est bleu. Mais vêt un coupe-vent quand surgissent les nues et son bel anorak quand sur les flots il pleut. La caboche en relâche, il manie la pagaie comme si c’était de...
(Sur les rimes d'un sonnet de José-Maria de Hérédia) Quelques rares esquifs, hors du chantier natal, se trouvent tellment beaux sous leur mines hautaines qu’ils estiment pouvoir voguer sans capitaine et nourrissent un rêve héroïque et brutal. Aux sons du gangsta rap ou du Viking Métal ils évoquent déjà ces équipées lointaines, comme s’ils disposaient de magiques antennes branchées sur le Wifi du monde Occidental. Chaque nuit, espérant des lendemains épiques, l’azur...
(Œuvrette de Razkayou sur les rimes d'un sonnet de Ronsard) Est-il jeu plus kiffant que se mettre en chandelle après avoir surfé les vagues en filant et, sans l’air d’y toucher, aller émerveillant, sur la plage bondée de nanas, la plus belle ? Lorsque mon pagayeur reluque une nouvelle, sur le sable soyeux à demi-sommeillant, il fait le guignolo pour qu’ell’ s’aill’ s'éveillant à l’abri de la dun’ tapissée d’immortelles. Il s’farcit des figur’s à s’y rompre les...

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