Squelettes 5

L'affaire tint huit jours dans la presse brestoise 

avant d'être rangée au fin fond du placard.
« C'est plutôt décevant. – Qu'espérais-tu Nanard, 

qu'ils trouvent l'assassin ? – Milo ? une cervoise. 

 

– Et pour moi, ce sera un ballon de gamay.
– C’est à se demander à quoi tout cela rime :
on ne sait toujours pas s’il s’agit d’un vrai crime. 

– Et je crains fort les gars, qu’on le sache jamais.

 

– N'avez-vous pas tiqué sur l'absence de fringues ? 

– En effet les nanas étaient à poil. – C’est dingue : 

ces ânes de perdreaux ne l’ont pas remarqué ! 

 

– Cela militerait pour la version naufrage :
elles étaient au pieu pour quelque enfantillage 

lorsque sur les récifs, leur yacht s’est disloqué. »

 

 

 

Depuis son premier rêve, Yffic, toute les nuits, 

sur le pont du vapeur, retrouve Abigaëlle.
Ses longs cheveux auburn, son rire en cascatelle. 

Il brûle de pouvoir la mener au déduit. 

 

Mais il n’est que voyeur d’un fragile cinoche,
le laissant au matin bien plus qu’embarrassé :
à peine esquisse-t-il ses manoeuvres d’approche 

que cocorique encore un sot gallinacé. 

 

Il commence vraiment à devenir maboule 

lorsqu'une nuit de mai, l'irlandaise roucoule
« Please, Yffic, my dear, throw my head in the sea »

 

Bien que nul en anglais il comprend la supplique. 

Il s'éveille aussitôt et saisit la relique,
court la jeter à l'eau, croit entendre « Merci » 

 

 

 

D'où provient cette voix ? Du ciel ? D'une sirène ? 

D'un fantôme amoureux surgi des profondeurs ? 

Croyez-moi les amis, ce n'est qu'un acouphène. 

Mais tout peut arriver en marge du Fromveur.